L’ambitieuse loi devant réguler la « fast-fashion »
La « fast fashion », aussi qualifiée de mode éphémère ou ultra express, repose sur une logique de renouvellement accéléré des collections, encourageant une consommation à haute fréquence et à bas coût. Ce modèle implique alors un impact environnemental massif. Selon les données de l’ADEME, l’industrie textile représenterait de 4 à 8 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, soit potentiellement plus que les vols internationaux et le trafic maritime réunis. Ce chiffre pourrait même s’élever à 26 % si les habitudes de consommation ne sont pas immédiatement changées. Elle est également la deuxième industrie consommatrice d’eau dans le monde et génère chaque année des millions de tonnes de déchets, notamment plastiques, souvent non recyclables.
Dans ce contexte, réglementer ces pratiques ne peut plus passer uniquement par des mesures incitatives ou des campagnes de sensibilisation. Il devient urgent d’imposer des limites à l’usage des plateformes qui, en facilitant la mise sur le marché de milliers de références renouvelées chaque semaine, contribuent directement à l’épuisement des ressources naturelles et à l’invisibilisation des conditions de production. Le texte voté entend précisément introduire des dispositions structurelles pour freiner cette mécanique, et inscrire dans le droit positif la responsabilité des acteurs numériques dans les déséquilibres environnementaux qu’ils contribuent à renforcer.
Déposée en janvier 2024 et portée par plusieurs députés, le but de cette loi est de freiner l’expansion de la mode éphémère et d’en atténuer les impacts environnementaux, sociaux et économiques. Face à l’explosion de la production textile, le texte vise à encadrer un modèle de consommation fondé sur la surproduction, les prix bas et le renouvellement accéléré des collections.
Portée par la volonté de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur textile, ainsi que ses effets sur les ressources en eau, la biodiversité et la pollution plastique, la loi entend aussi répondre aux atteintes aux droits humains dans les chaînes de production mondialisées, au recul de l’industrie textile française et à l’aggravation du déficit commercial.
Trois axes structurent cette proposition. Le premier vise à sensibiliser les consommateurs à travers un affichage obligatoire de l’impact environnemental des vêtements et la promotion du réemploi et de la réparation. Le second renforce la responsabilité élargie des producteurs par un système de modulation financière, selon l’impact des produits mis sur le marché, avec des pénalités progressives visant les pratiques les plus polluantes. Le troisième interdit la publicité pour la fast fashion, à l’image des restrictions déjà en vigueur pour les produits néfastes à l’environnement ou à la santé publique.
Cette approche globale articule réglementation des volumes, éco-conception et responsabilisation des marques, pour orienter le marché vers des pratiques plus durables, mieux protéger les consommateurs et rééquilibrer la concurrence en faveur des acteurs vertueux.
À l’origine, la proposition de loi visant à réduire l’impact environnemental de l’industrie textile, adoptée par l’assemblée nationale en première lecture le 14 mars 2024, prévoyait au quinzième alinéa de son article 2, des pénalités applicables aux produits soumis au principe de responsabilité élargie du producteur. Cette responsabilité est faite en application du principe de responsabilité élargie du producteur, « il peut être fait obligation à toute personne physique ou morale qui élabore, fabrique, manipule, traite, vend ou importe des produits générateurs de déchets ou des éléments et matériaux entrant dans leur fabrication, de pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ainsi que d'adopter une démarche d’éco-conception des produits, de favoriser l'allongement de la durée de vie desdits produits en assurant au mieux à l'ensemble des réparateurs professionnels et particuliers concernés la disponibilité des moyens indispensables à une maintenance efficiente, de soutenir les réseaux de réemploi, de réutilisation et de réparation tels que ceux gérés par les structures de l'économie sociale et solidaire ou favorisant l'insertion par l'emploi, de contribuer à des projets d'aide au développement en matière de collecte et de traitement de leurs déchets et de développer le recyclage des déchets issus des produits ». Ainsi l’objectif était d’appliquer des pénalités progressives aux articles issus de la mode éphémère, l’alinéa 15 de la proposition de loi prévoyait des pénalités de 5 euros par produit en 2025, de 6 euros par produit en 2026, de 7 euros par produit en 2027, de 8 euros par produit en 2028, de 9 euros par produit en 2029 et de 10 euros par produit en 2030. Le but de cette pénalité progressive était de faire changer progressivement les habitudes des consommateurs en commençant par consommer moins d’articles puis se détourner totalement de ces plateformes devenant financièrement désavantageuses.
L’article 3 de la proposition de loi se tourner lui vers l’interdiction de la publicité pour ces marques de mode express. Cette interdiction vise ainsi les marques avec un renouvellement massif de leurs collections de vêtements et accessoires ou encore d’autres entités faisant la publicité direct ou indirect de ce mode de commercialisation. Il est ainsi fait mention dans cet article 3, au deuxième alinéa, que ce modele économique « compromet l’objectif de protection de l’environnement et de lutte contre le réchauffement climatique », revenant sur l’objectif clair et assumé de ce projet de loi. Le troisième alinéa de cet article fait aussi mention expresse des influenceurs, étant les premiers à faire la promotion massive de ces plateformes il y a de ça plusieurs années, donnant au passage une définition de ce qui peut être considéré comme une communication commerciale de la part de personnes physiques. Il s’agit alors, à titre onéreux, d’utiliser sa notoriété auprès de son audience pour « communiquer au public, par voie électronique, des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque et qui exercent l’activité d’influence commerciale par voie électronique ».